Des membres de syndicats aéronautiques manifestent contre la privatisation de la compagnie aérienne publique Aerolineas Argentinas devant le Congrès à Buenos Aires,Argentine,le 25 septembre 2024. JUAN MABROMATA/AFP « Nous sommes argentins et argentines,et s’il y a un peuple qui sait piloter au travers des tempêtes,c’est bien nous. » Orgueil national,mythe de la résilience,et,bien sûr,métaphore aérienne : la vidéo publicitaire d’Aerolineas Argentinas déroule l’idée d’une entreprise aéronautique se confondant avec la population,appartenant à tous. En somme,une authentique compagnie publique. C’était en 2022. Deux ans plus tard,avec le président ultralibéral Javier Milei au pouvoir,l’horizon est radicalement différent.
Le 2 octobre,l’exécutif a publié un décret afin de lancer sans attendre les discussions parlementaires nécessaires à la privatisation d’Aerolineas Argentinas. Avant même son arrivée au pouvoir,en décembre 2023,Javier Milei prévenait : « Tout ce qui peut être entre les mains du secteur privé le sera. » Dans sa ligne de mire libertarienne : soixante entreprises publiques,au total,qui seraient,selon lui,mieux gérées par le secteur privé que par un Etat devant être réduit à la portion congrue.
« En 2023,seules sept entreprises publiques ont obtenu des bénéfices »,relève le décret présidentiel. Celui-ci dénonce le « surdimensionnement » en matière de personnel,notamment de pilotes,d’Aerolineas Argentinas,ainsi que les 8 milliards de dollars (7,3 milliards d’euros) que l’Etat a dû lui verser depuis sa nationalisation en 2008,en raison de son « déficit chronique ». Pour justifier son dessein,le gouvernement met notamment en avant les chiffres record de la pauvreté (52,9 % de la population),en progression de onze points depuis son arrivée au pouvoir : « L’Etat doit destiner ses moyens budgétaires limités aux besoins de ceux qui sont le plus défavorisés. »
« Mais Aerolineas Argentinas est un outil stratégique pour un gouvernement et elle accomplit une mission de service public ! »,réagit Carlos Figueroa,ancien directeur de la communication de l’entreprise (2019-2023). « L’Argentine est le huitième plus grand pays au monde [sa superficie représente cinq fois la France],sans sa compagnie porte-drapeau et des liaisons certes peu avantageuses commercialement,des régions entières seraient déconnectées »,poursuit l’ancien porte-parole,alors que le pays ne peut pas compter sur un solide réseau ferroviaire,démantelé pendant les libérales années 1990. « Et puis,il faut aussi souligner les recettes fiscales ainsi que l’entrée de devises étrangères que génère l’achat de billets »,argumente M. Figueroa. « La stratégie de rationalisation des entreprises publiques ne doit pas se réduire à une privatisation »,renchérit l’économiste Nicolas Gadano,le 21 septembre,cité par le quotidien Clarin.
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